La force des signaux faibles

La force des signaux faibles /Voir l'invisible, écouter l'inaudible mars 2015

S’intéresser aux signaux faibles, c’est s’attacher à lire entre les lignes pour déceler de petits soubresauts au fort potentiel. Ces indices discrets ne font pas grand bruit mais peuvent annoncer les grands changements de demain. A l’origine de mutations et de nouvelles tendances, les décrypter donne aux entreprises qui prennent la peine de les écouter, un temps d’avance pour s’adapter et évoluer avec leur temps.

Au commencement était la curiosité…

Le signal faible est une particularité dans le mouvement général, un fait original qui conduit celui qui le repère à imaginer des tendances futures. Pour que celui qui se met en posture d’écoute, de questionnement et de réception le déniche, il faut autant de curiosité que d’instinct. La curiosité pousse à aller « au-delà », à croiser les disciplines et à sortir du cadre normatif. L’instinct donne la capacité de nous arrêter sur un détail qui provoque et questionne. Les deux combinés permettent alors de ne pas suivre le mouvement mais d’aller chercher ailleurs pour trouver l’inspiration de demain. 

Les signaux faibles sont partout, dans les médias, la technologie, les comportements sociaux, l’environnement, les évolutions politiques et démographiques et les rater peut coûter très cher. L’exemple de Kodak, passé à côté du tournant numérique, n’en est que trop révélateur. La firme américaine qui, rien que sur son site de Rochester comptait 145.000 salariés en 1988, n’en dénombre aujourd’hui plus que 17.000. Par manque d’anticipation ou excès de confiance, elle s’est rapidement faite dépasser avec l’arrivée de la vague Internet. Ses concurrents, plus alertes, ont tiré leur épingle du jeu en sentant le vent de la génération connectée venir. Qui plus est, de nouvelles startups émergentes ont amorcé le changement fatal à la multinationale trop sûre de ses innovations et peu enclin aux changements. Les chiffres parlent d’eux mêmes : en 2012, Instagram valait 1 milliards de dollars pour 14 salariés et Snapchat serait actuellement valorisé à près de 20 milliards pour une soixantaine d’employés. Une révolution autant technique que sociale.

Signaux faibles : marketing prédictif, Big Data, numérique et nouvelles tendances

©Maurizio Pesce via Flickr CC Licence

Le numérique… voici un vaste sujet dans lequel dénicher de nombreux signaux faibles. L’arrivée de la génération Y sur le marché amène, à titre d’exemple, de nouvelles considérations quant à une organisation du travail moins hiérarchique, plus horizontale et transversale. Ainsi se dessinent des pistes de reflexions utiles aux entreprises : fin de la hiérarchie traditionnelle, importance du collaboratif (génération du partage), retour à l’humain (la superstructure ne doit pas écraser l’individu), initiative de l’individu aux moyens décuplés (réseaux sociaux)… Parallélement, de nouveaux comportements que l’on décode par le succès d’initiatives telles qu’Über (on parle d’ailleurs d' »uberisation » de la société ou le temps prime sur le capital), de Kickstarter, d’Airbnb, de Lending Club ou encore d’Udacity donne quelques idées sur ce que sera l’organisation sociale de demain autour d’une recherche plus profonde dans la créativité, le choix et l’innovation. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si la plupart des patrons de ces entreprises à succès sont des designers ou s’inspirent du design pour créer leur business model. Des innovations sans tabous, bien pensées et faciles à utiliser qui sont autant de nouvelles références dans leurs domaines. 

Petits signaux, Big Data

©Escola Santa Anna via Flickr CC Licence

L’ère du tout numérique fait entrer l’analyse des signaux faibles dans une nouvelle dimension. A coup de Big Data, il est maintenant possible (et il le sera encore plus dans le futur avec l’arrivée massive des objets connectés sur le marché domestique) de récolter des données de manière extrêmement précise et ciblée. Les panels de consommateurs laissent petit à petit place au client-individu. Bien comprises, les données recueillies recèlent de signaux faibles qui permettent, par exemple, de concevoir pourquoi un produit a plus de succès qu’un autre aboutissant ainsi à des prédictions et adaptations concrètes de la part des entreprises. Le but, encore et toujours : lier le consommateur à la marque par une relation de confiance, de compréhension et de dialogue en anticipant ses attentes. Amazon, précurseur, a pour projet de lancer un service ou le colis sera envoyé avant même d’être commandé. Signal faible d’un ordre du tout prédictif et du tout contrôlable ?

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