Les marques patrimoniales

Les marques patrimoniales /Le jeu subtil entre héritage et innovation juin 2016

Il est des marques que nous aimons plus que d’autres, des marques dont nous ne mettons même pas l’existence en question tant elles ont valeur d’exemple. Elles font partie prenante de notre quotidien : nous les avons achetées et les achetons toujours, nous les avons délaissées puis retrouvées… Elles sont des repères dans notre parcours de consommateur. Quelles sont les raisons de ce sentiment de sympathie ? Et pourquoi certaines marques cristallisent la fidélité client tandis que d’autres sont, au fur à mesure, délaissées malgré les tentatives de rebond ?

La confiance du consommateur

Nutella, Lu, Orangina… les marques patrimoniales ont acquis, au fil des ans, la sympathie de consommateurs rassurés par une légitimité assise sur un savoir-faire historique. Pour autant, la position de leader n’est jamais acquise et nécessite autant d’ajustements que de flaire pour devancer les tendances. La confiance et l’intérêt d’un consommateur devenu, avec le temps, très versatile peut vite basculer. Une marque plus innovante, créative et engagée peut rapidement prendre le devant face à des mastodontes dont l’âge peut aussi bien être une force qu’un frein. Mais alors, comment rester dans la course ? Qu’est ce que Lego a réussi dans sa renaissance que Kodak n’a pas su saisir ? Pourquoi Cachou Lajaunie continue de se vendre sans innovations notoires ? Et comment fait Carambar pour garder la confiance des petits et des grands ?

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Photo ©Sylvain Naudin via Flickr CC Licence

Savoir saisir l’héritage…

Le client n’est pas juste fidèle à un produit. Il est fidèle à une culture, à un ensemble de valeurs fondé sur une histoire et un savoir-faire formant l’eco-système de l’entreprise. Cette histoire construit l’héritage et la renommée de la marque auprès du public. Des noms comme Cachou Lajaunie ou Carambar continuent de fidéliser leurs consommateurs par une réputation assise depuis longtemps. Quand la première, détenue par le géant américain Mondelez, vend chaque année plus de 10 millions de petites boîtes jaunes au design vintage indétrônable, la seconde rassemble les générations dans une relation privilégiée (n’en témoigne le tollé provoqué sur les réseaux sociaux par la fausse annonce de l’abandon des fameuses blagues). Cet héritage a fait et continue de faire la réputation des marques patrimoniales. Pour autant, s’en détacher avec audace et créativité semble plus que jamais nécessaire pour rester dans la course.

…pour amener la disruption.

Cet héritage est autant un point fort qu’un danger pour les marques lorsqu’il s’agit d’envisager de nouvelles pistes de développement, passage obligé sous peine de finir dans les limbes du has-been consommatoire. Changer ne sous-entend pas rompre avec l’ADN de marque. La désincarnation pouvant être fatale, la rupture créative doit s’accompagner d’une interrogation sur l’histoire de l’entreprise et du produit. L’impératif ? Savoir trouver et exploiter les opportunités pour se repositionner en créant la surprise. Prenons l’exemple d’Orangina : c’est l’esprit positif et subversif intrinsèque à l’entreprise qui a guidé l’agence Fred&Farid dans une campagne animalière décalée, promu, à l’époque, campagne préférée des Français (source : Ipsos).

Les marques patrimoniales : campagne de publicité Orangina

Photo Orangina ©Benjamin Stäudinger via Flickr CC Licence.

L’expérience client

Après l’héritage et la créativité rupturiste, ce qui fait le succès d’une marque patrimoniale à travers le temps est sa capacité à proposer une expérience client inattendue, qu’elle soit multi-canale ou in-store (à l’image de la Maison Maille de Londres, première boutique internationale de la marque mettant en avant le côté premium du produit, loin de son image de mass-market). La relation de proximité avec le client est devenue un impératif avec l’avénement des réseaux sociaux et l’ère du consommateur informé. La saga « Be Fruit » en est le meilleur témoin : accompagnée d’un storytelling bien ficelé, elle n’a cessé de rassembler des internautes friands d’interactions et de connivence. Autre exemple de success story : Lego. Après un passage à vide de plusieurs années, l’entreprise change de cap dans le milieu des années 2000 et remet un acteur incontournable au centre de sa stratégie : le consommateur créatif. Au fur et à mesure de son développement, la marque emblème donne la parole aux utilisateurs via des plate-formes web telles que Rebricks ou Lego Ideas et crée une véritable communauté d’échanges basée sur l’imagination débordante de chacun. Un bel exemple de réussite se servant du virage digitale pour toucher et rassembler les consommateurs d’hier et d’aujourd’hui. 

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capture écran Youtube Campagne Oasis Pocket ©Oasis Be Fruit

Face aux marques alternatives et startups, les marques patrimoniales ont pour devoir de montrer l’exemple de la réinvention sans se reposer sur leurs acquis. Entre continuité et rupture, elles se doivent de construire une culture de marque intègre et cohérente irradiant sur l’ensemble de leurs actions. Engagement de qualité, exploration graphique, diversification ou, au contraire, recentrage sur les fondamentaux… les possibilités de réinvention sont nombreuses. Au final, une marque qui tourne n’est pas forcément une marque qui fera la meilleure campagne de communication mais une marque qui saura parler au consommateur avec sincérité, en associant l’histoire et le présent, tout en sachant penser l’avenir.

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