Le phygital selon Curius

Le phygital selon Curius /Tribune mars 2016

Le phygital, contraction de physique et digital, est sur le devant de la scène médiatique depuis quelques années. Présenté comme la nouvelle ère de la consommation offline réconciliant les différents canaux, il est le saint-grâal de l’expérience client. Pour autant, personne n’a encore su tirer de règles précises d’application et ce, pour une bonne raison: le phygital est inséparable de la marque, il en dépend. La stratégie digitale est, de ce fait, indissociable des trois piliers fondateurs d’une marque : l’esthétique, l’usage et la vision. 

Le phygital fait corps avec la marque.

Les petites expériences du quotidien nous amènent souvent à nous interroger sur des sujets plus vastes. Il y a peu, j’ai vécu une expérience client globale. Problème avec mon iPhone, direction le Genius Bar de l’Apple Store Opéra. En devant régler la réparation, un vendeur m’invite à prendre place autour d’une table haute que d’autres clients et vendeurs partagent. Le design d’intérieur est à l’image de la relation : décontractée. Nous faisons le point sur ce qui a été fait. Il me tend son iPhone équipé d’un terminal de paiement. Je règle et repars, satisfait de cette relation décloisonnée et fluide qui, par l’outil technologique, casse les schémas classiques du vendeur conseil et vendeur caissier. Bien évidemment, c’est le cœur de métier d’Apple que d’intégrer la technologie dans ses magasins. Pour autant, l’expérience va bien au-delà. Elle est ici globale et allie parfaitement monde physique et monde digital. Nous sommes dans l’application du phygital, ce mot totem que l’on nous sort depuis quelques années. Nous sommes dans la parfaite maîtrise de l’expérience de marque.

Look, think, do.

L’expérience de marque. Voilà ce qui est au centre du phygital. Aujourd’hui, le client ne suit plus un parcours d’achat tout tracé et il n’oppose plus online et offline. Il doit pouvoir acheter sur Internet, recevoir chez lui et retourner en magasin en toute facilité. Il doit aussi pouvoir recevoir des informations et du contenu utiles sur son smartphone sans effort de sa part. Pour une marque, il s’agit donc de construire des ponts entre digital et physique pour servir ce client devenu exigeant avec l’avènement du e-commerce. Cela ne doit pas être une tendance gadget où le support l’emporte sur l’expérience. Cette stratégie doit être pensée pour le client à travers le prisme de marque.

Une marque d’abord, c’est une esthétique. Un « look » qui doit se retranscrire dans l’expérience digitalisée à travers des contenus pertinents et représentatifs. Les playlists Starbucks créées par les équipes des magasins US désignés, en partenariat avec Spotify, en sont un bon exemple. Ici, l’expérience client est personnalisée (l’utilisateur peut sauvegarder et liker ses pistes préférées pour influer sur la sélection) et reste en lien direct avec le positionnement du groupe (lié à la musique depuis sa création).

Ensuite, une marque, c’est une vision qui a pour but de donner du sens. Un exemple : l’annonce récente du géant Woolworths d’aller plus loin dans le service du click and collect. En s’associant avec le New South Wales Government, l’entreprise propose aux habitants de Sydney de collecter leurs achats en gare après les avoir commandés par Internet. Un gain de temps inestimable et une facilité au quotidien qui place Woolworths comme un allié du consommateur. Une vision de marque shopper-centré intéressante à exploiter. 

Une marque, enfin, c’est un usage, une expérience du produit. Aujourd’hui, laisser le produit derrière une vitrine n’est plus une possibilité. Le client doit pouvoir le toucher, le tester et le manipuler. Il doit aussi pouvoir être conseillé de façon quasi personnalisée par un vendeur ultra-compétent. C’est lui qui, à l’avenir, fera la différence entre digital et physique. Il est celui qui créera du lien, de la proximité, qui familiarisera avec la marque et démontrera avec le produit. Un conseiller expert et friendly, porte-parole de la vision de l’entreprise, à l’image de celui d’Apple.

Pour une stratégie phygitale efficiente il faut donc penser à la fois pour le client et par la marque. Le défi est grand pour le retail mais aussi incontournable. Le physique n’est pas mort et il sera même indispensable pour les produits d’innovations à forte valeur ajoutée. Le pari reste d’évoluer main dans la main avec des clients au comportement mouvant et de leur proposer des solutions aussi esthétiques qu’utiles. Les possibilités sont immenses pour ceux qui sauront les imaginer.

Pascal Viguier, CEO de Curius 

 

 

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